Emma Fulconis court dans l’arrière-pays niçois, pour s’amuser, pour aller à l’école, pour rien, jusqu’au jour où, visitant un ami, le chien du grand-père lui broie l’agrafe, nom donné à un os proche du péroné. Elle ne pourra plus courir. Sa famille paternelle est originaire d’Algérie, ce sont des Harkis. Le chien n’aimait pas les arabes, a dit le grand-père. Emma tente de comprendre son histoire et la douleur qui l’habite. C’est une blessure ouverte tant morale que physique que décrit Maryline Desbiolles (Paysage au hangar : conversation avec Bernard Pagès, Les Notes mars 2024). La construction est capricieuse comme la course, les chapitres sont courts sauf pour parler de l’histoire de l’oncle Akim, ancien Harki dont notre héroïne est très proche. On partage sa vie dans les montagnes loin de toute activité urbaine, où ont été installés des camps d’accueil pour les Algériens qui se sont battus aux côtés des Français, mais que la population locale rejette. La douleur vrille quotidiennement le corps de cette jeune rescapée courageuse. La fin ouvre sur une possible libération. Un court roman à l’écriture fine et suggestive. (C.M. et A.Le.)